La vie est un songe de Calderón. Mise en scène de Clément Poirée au Théâtre de la Tempête

fd9116_1b6ce08e28744ecab98553bb5f7f5fcfmv2_d_5184_3456_s_4_2.jpg

Le rêveur doit garder secret son rêve durant trois jours pour que celui-ci se réalise. La pièce La vie est un songe s’étend sur trois journées. La mise en scène de Clément Poirée met en avant ce chiffre trois, l’un des fils conducteurs de son spectacle. En effet,  nous pouvons, dès le début, discerner, dans un brouillard de fumée, lequel apporte une impression de flou matinal, une scène divisée en trois niveaux par des rideaux de chaque côté de celle-ci. Dans ce brouillard nous pouvons deviner trois personnages qui s’avancent à tâtons au milieu du désert. Ces personnages semblent plus relever du registre animal que de l’humain. Un quatrième entre, il porte une couronne. Puis noir cut, crash d’un avion… C’est Rosaura qui arrive, accompagnée de Clairon.

Le trois est aussi considéré comme le chiffre parfait, ce qui peut expliquer sa présence dans le texte de Calderón, auteur qui appartient au théâtre baroque espagnol. En effet, il y a trois prétendants au trône de Basile : Sigismond, Astolphe et Etoile. Basile a « trois choses à considérer » pour décider à qui il doit le confier. Enfin, le breuvage que Clothalde donne à Sigismond pour l’endormir est constituer de trois plantes, « l’opium, le pavot et le jusquiame ».

Nous pouvons également souligner la place de l’illusion, de l’incertitude présente dans le spectacle. En effet, les lumières appuient une vision onirique grâce à la fumée. Les personnages disparaissent dans les rayons de lumière comme s’ils étaient des figures fantomatiques. Par ces jeux de lumières et de fumée, les personnages sont souvent semblables à des ombres. Nous sommes donc d’une certaine façon comme à la place des hommes dans la caverne de Platon en train d’observer quelque chose sans savoir ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. La frontière entre le rêve et la réalité est extrêmement fragile.

Le theatrum mundi a donc également une place importante. En effet, plusieurs personnages, comme Clairon ou encore le roi Basile, s’assoient sur les marches entre les sièges du public et ils observent l’action de la même place que nous. Ils sont un peu comme des spectateurs intérieurs.  Au début, le roi Basile observe le public à l’aide de sa longue vue. Nous sommes donc d’entrée de jeu concernés par l’action qui va se dérouler devant nous. Cette idée est soulignée à la fin du spectacle où nous avons l’impression que lors du premier salut ce sont encore les personnages qui sont devant nous. En effet, Sigismond porte encore son manteau de roi et les autres l’aident à le porter. Lorsqu’ils reviennent, il l’a ôté, et la salle s’éclaire totalement. Nous avons donc été pendant tout le spectacle les sujets du roi à qui l’on a joué une comédie. Ceci peut également expliquer le ridicule du roi Basile, et également d’Etoile qui, en outre, apparaît réellement superficielle. De surcroît, la mort de Clairon a l’air d’un songe, puisqu’il se relève tout de suite. Il retire sa veste et ses lunettes d’aviateur qui représentent son corps.

Nous pouvons donc dire que nous assistons donc au « grand théâtre du monde ».

Informations Pratiques : 

Théâtre de la Tempête (Cartoucherie)
Rte du Champ-de-Manoeuvre
75012 Paris

Jusqu’au 22 octobre 2017 à 20h dimanche à 16h, relâche le lundi