LES TROIS SOEURS, ТРИ СЕСТРЫ de Tchekhov. Mise en scène Timofeï Kouliabine à L’Odéon-Théâtre de l’Europe-Ateliers Berthiers

En entrant dans la salle nous sommes d’abord happés par la superbe scénographie. C’est un intérieur de maison. Nous recevons avec le programme un plan de la maison des Prozorov, pour nous repérer dans l’espace. Comme dans n’importe quelle grande maison, il y a de la vie partout.

Timofeï Kouliabine a choisi de mettre en scène ce texte en langue des signes russe. Ce qui, selon moi, retire une part de réalisme au théâtre de Tchekhov, puisque en effet on ne trouvera jamais une famille entière où amis, domestiques, fiancée et époux sont tous sourds et muets.

Cette réserve mise à part, la langue des signes offre la possibilité de mettre des actions en parallèle à divers endroits sans que cela ne se transforme en cacophonie sur le plateau. Mais si le chaos n’est effectivement pas dans le son et moins encore dans la parole, il se trouve dans la démultiplication des gestes des personnages.

En effet, plusieurs dialogues se déroulent au même moment mais un seul est surtitré. Même si nous ne comprenons pas tous les mots, nous comprenons le sens de l’échange. Par exemple, lors d’une dispute entre Natacha et Andreï nous devinons facilement les reproches qu’elle peut adresser à son mari.

Les personnages sont tous en blanc sauf Macha pendant la première partie. Ce blanc des vêtements qui domine l’image scénique ajouté aux couleurs du décor très lisse et géométrique  donne une atmosphère qui fait penser à un hôpital psychiatrique. Nous avons l’impression d’assister à une caricature des personnages de Tchekhov. Ces derniers n’attirent aucune compassion.

Un personnage, Féraponte, apparaît durant la deuxième partie. Ce dernier parle en russe tout en signant. Il est le seul à utiliser sa voix.

On a ici du mal à comprendre ce parti-pris de Timofeï Kouliabine, qui consiste à décider que ce personnage, qui est un gardien, puisse user de sa voix pour parler.

Serait-il le gardien de cet asile dont tous les membres sont sourds et muets ?

Dans la troisième partie, Irina souligne « C’est peut être que nous n’existons pas et que nous donnons simplement l’impression d’exister ». Les personnages joueraient-ils en fait tous des rôles ? Ils n’appartiendraient donc pas tous à la même famille. Ils rêvent seulement qu’ils partagent leur vie alors qu’ils se sont seulement retrouvés dans ce grand lieu ensemble par hasard.

Comme nous spectateurs seulement réunis par notre commun amour du théâtre, lequel nous a poussés à nous retrouver durant quatre heures dans la même salle pour assister au même spectacle, et en ressortir avec des émotions et des sentiments divers !!

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